lundi 23 octobre 2017

Braderie urbaine



Dans le souci de reloger à moindre frais certains services de la ville (près de 150 personnes), le maire de Toulouse a décidé en 2016 une transaction particulière. Échanger le bâtiment qui les abrite, propriété de la ville, avec l'un de ceux de la société ICADE situé dans un autre quartier, à Borderouge. 

Initialement, le projet prévoyait la démolition du bâtiment dans le but de construire un campus numérique privé. Compte tenu de ce besoin de démolition, les domaines validèrent le prix et les termes de l'échange. Le coût pour la ville (400 K€) correspondait donc à la différence entre la cession de son bien et l'acquisition du nouveau lieu. C'est ce qui fut voté en 2016.

C'était sans compter sur une nouvelle délibération d'octobre 2017 qui viendra modifier à la fois la nature et l’équilibre économique et foncier initial. Elle avalisera la cession complémentaire d’une partie de la place de l’Europe au groupement privé Icade/Ynov sans oublier naturellement de la déclasser pour y permettre un droit à construire. 

  • Nouvel équilibre, nouveau prix : L'échange se fait désormais à somme nulle. la ville n'a plus à débourser quoique ce soit. 
  • La surface foncière impactée augmente de 2200 m² pour un coût d'acquisition de 500 K€, soit 225 € le m² (tandis que la surface plancher augmente de 1500 m²). 
  • Le bâtiment n'est plus détruit mais réhaussé et le projet envisage désormais davantage d'activités lucratives (hôtel et commerces)

Projet initial mars 2016






surface m²
prix /m²   domaines
Total
en %  surface totale

Résidence étudiante
8500
                      953,64 €
     8 105 940 €
55%

Hôtel et commerces


                    -  
0

Ecole
5100
                      352,75 €
     1 799 025 €
32%

Espace co-working / bureau
2000
                      352,75 €
        705 500 €
13%

Total
15600
                          680 €
   10 610 465 €


Assiette fonciére
 4500 m²



L'école représente 1/3 de la surface plancher
La résidence étudiante 55% de la surface plancher
Soit un total de 88% de surface destinée aux étudiants



Projet voté le 12/10/2017






surface m²
prix /m²   domaines
Total
en %  surface totale
Résidence étudiante
3175
                      900,00 €
     2 857 500 €
19%
Hôtel et commerces
7052
                      900,00 €
     6 346 800 €
41%
Ecole
3339
                      250,00 €
        834 750 €
19%
Espace co-working
3560
                      300,00 €
     1 068 000 €
21%
Total
17126
                          649 €
   11 107 050 €
(+) 496.585 €
Assiette fonciére
6700 m²
(+) 2200 m²



L'école ne représente plus que 19% de la SDP
La résidence étudiante 19% de la SDP

La partie hôtel "classique" représente 41% de la SDP
La SDP destinée aux étudiants n'est plus que de 38%


Entre le projet initial et le projet voté :
2200 m² supplémentaire de foncier correspondant à 30% de la place de l'Europe pour 496000 euros

Cette nouvelle cession d’espace public est celle d’une véritable braderie pour un lieu qui aurait mérité un autre avenir que celui de la spéculation.

Bien sûr, les agents de la ville méritent des conditions de travail améliorées. Évidemment, la place de l'Europe mérite une véritable requalification. Mais ce que révèle cette affaire est l'absence totale de réflexion préalable pour savoir ce que l'on souhaite avant de se saisir paresseusement d'une opportunité offerte par le marché. C'est bien tout le contraire d'une politique de l'urbanisme,

La place de l'Europe, à Toulouse, mérite mieux que son amputation et la livraison, par procuration, de son devenir. A ce titre, méritant mieux qu'un compromis avec les promoteurs, elle aurait gagné à voir tracé son avenir avec les riverains.

Visionner le reportage de FR3 du 7 octobre 2017

vendredi 13 octobre 2017

"La démocratie sociale a-telle encore un avenir ?"

Deux sujets majeurs dans l’actualité du moment, celui de la démocratie sociale et de la démocratie territoriale. Leur enjeu commun : la survie des lieux de pouvoirs intermédiaires autonomes et des contres-pouvoirs.

Ce n’est pas un hasard. C’est un reflet. Le reflet d’une conception démocratique ou l’horizontalité masque en réalité le retour d'une verticalité, de la hiérarchie et de la subordination. Plus que tout, c'est ce qui m'inquiète dans les évolutions qui se dessinent et traversent notre société...

Mon introduction à la conférence des Rencontres Progressistes du 5 octobre 2017

Toulouse, 2020 ne sera pas un remake de 2014

Le dernier conseil municipal de Toulouse est intervenu en pleine période de communication du maire d'une ampleur sans précédent.
Fortement axée sur le bilan de son prédécesseur,  la campagne actuelle du Maire de Toulouse aurait-elle si peu confiance dans sa propre politique à vouloir ainsi rejouer systématiquement le dernier match électoral ? En donnant le sentiment de ce remake qui instille subrepticement celui de son dénouement final, Jean-Luc Moudenc provoque ainsi la corde sensible de son opposition qui crie aux mensonges ! En l'obligeant à exprimer ainsi sa légitime défense, il l'installe de fait sur la défensive. Le monde à l'envers !

Tout cela est bien classique. Renverser la charge de la preuve et attaquer avant d'être soi même soumis à l'examen de sa propre action. Évidemment, tout cela ne peut fonctionner que si l'opposition tombe dans le panneau. Je ne suis pas certain qu'elle résiste à la tentation sauf à prendre désormais des mesures de réorganisation.
2020 ne sera pas un remake de 2014.

Cette stratégie limpide visant à consigner l'opposition dans la défense conservatrice de son action passée ne doit pas être alimentée. Il ne s'agit pas pour elle d'édulcorer ou d'avoir honte de ce qu'elle réalisa. Bien au contraire. 80 % de ce qui est inauguré par Jean-Luc Moudenc fut porté sur ses fonds baptismaux par les prédécesseurs. De même que bien des réalisations mises en service aujourd'hui ont été rendues possibles par la gestion d'hier.  
Cette "gestation pour autrui" est justement une paternité que tente de faire oublier le maire actuel. De ce point de vue, lui qui siège depuis 32 ans à la mairie de Toulouse dont 26 dans la majorité, la pluriannualité de son bilan devrait le calmer. Elle donne une indication sur l'ampleur du passif et de des retards toulousains.

Mais pour la gauche, rétablir les faits, tels des greffiers du nécessaire, ne suffit pas à construire une utilité pour demain.  Il lui revient d'élaborer une stratégie et un discours intelligible et positif.
En cette période de refondations tous azimuts, le temps présent doit aussi être celui d'une refondation de l'opposition...municipale. Les signaux doivent être clairs, le discours de la responsabilité assumé et les incarnations collectivement décidées. Sortir de l'état végétatif pour passer à un stade productif nécessite l'émergence d'un contexte qui donne envie d'avoir envie. Il ne peut être celui du dégagisme pour seule boussole. Il ne peut être non plus celui du statu quo.

Ainsi donc, le rassemblement de l'opposition ne pourra se faire en s'arcboutant sur les acquis de son passé glorieux ou en "syndicalisant" sa rhétorique au risque de se fossiliser dans le corner de l’histoire. 
Au cœur de l'opposition, la responsabilité pour ouvrir le chemin incombe aux socialistes. A condition qu'il soit celui de l'ouverture, de la crédibilité autant que celui de l'imagination. Il leur revient de prendre en main le destin des progressistes et d'un nouveau "socialisme municipal".


mardi 5 septembre 2017

Refonder ? Et pourquoi pas fonder ?



2017 : le candidat socialiste à la présidentielle n’a obtenu que 6% des suffrages et désormais quitté les rangs de son parti. Son concurrent à la primaire en a fait de même et près de 100 députés En Marche sur 330, hier socialistes, ont suivi le chemin de la rupture. Depuis le début du processus, ce sont des millions d’électeurs qui ont précédé ou accompagné ces mouvements. A l’échelle de son histoire, jamais le mouvement socialiste n’aura subi une telle scission. Autant dire le mot..

L’échec fut violent. Son onde de choc rend encore dérisoires, aujourd'hui, toutes les certitudes péremptoires. Le peuple ne se trompe pas. Certes, la vague Macron a davantage résulté d'un besoin de renouvellement et d'une fatigue démocratique face au jeu classique de l'alternance que d'une adhésion à son programme. Mais ce qu'ont proposé les socialistes dans le cadre de cette campagne présidentielle ne saurait constituer pour autant, sur le fond comme sur la forme, la base d’une reconquête. 

Il serait trop facile d'arrêter le curseur temporel à cela. Sans doute faut-il remonter plus loin, sans doute faut-il revisiter les conditions singulières de chaque période historique de la gauche au pouvoir et isoler la récurrence de ses difficultés dans l'exercice même de ce dernier. 
Sans doute faut-il s'interroger sur sa capacité à se dépasser elle-même, à anticiper les évolutions du monde, à analyser la sociologie de ceux à qui elle s'adresse, à s'émanciper d'une forme de pré-science et d’arguments d’autorité dont elle s’est sentie si souvent autorisée par son ancrage dans l'histoire du mouvement ouvrier.

Aujourd'hui, tout le monde s'accorde sur le mot de refonder. Mais ne faut-il pas plutôt fonder que refonder, construire au lieu de reconstruire, innover au lieu de rénover.  

Pour dessiner les contours d’un nouveau progressisme de gauche, la recherche d’un chemin praticable dans l’opposition comme dans l’exercice du pouvoir est un prérequis. C'est celle d'un nouveau contrat social, déclinant les nouveaux compromis historiques d’une société plus cohésive, retissant le lien entre les exclus et les salariés, entre la production et la redistribution, entre la rente et le risque, entre la République et la démocratie, entre l’État et la société, entre l’égalité et la liberté.

Il ne suffit pas de s’opposer pour se redéfinir ou d’adouber toutes les révoltes comme si elles étaient en soi légitimes. Il faut sortir d’une définition négative et subsidiaire de la gauche. Elle ne pourra renaître en brandissant des chapelets de généralités. 
La diabolisation du pouvoir, après l’avoir exercé soi-même, ne serait que le réflexe d’une paresse insensée. De même, la diabolisation du bilan de la gauche ne saurait devenir le gage d’une vertu retrouvée. La démocratie souffre de trop de caricatures et c’est une véritable crise de fatigue à l'endroit de la gauche comme de la droite dont elle a été l’expression. 

Il faudra aussi combattre les forces qui, se prétendant les nouveaux gouvernails de l’histoire, entendent incarner à gauche comme à droite, la quintessence du peuple afin de mieux s’en servir, pour les uns, ou de mieux l’asservir, pour les autres.

« L’homme-peuple » ou « la femme-peuple » est une véritable construction idéologique, au service d’une théorie de l’incarnation, exaltant le mythe de la souveraineté immédiate et méprisant institutions, organisations collectives, corps intermédiaires.
Face à ces populismes rampants, le progressisme doit tirer les leçons de ses impuissances, de l’épuisement de ses modèles, de ses discours, de ses pratiques.

De cette crise, Emmanuel Macron est le symptôme. En sera-t-il la solution ?

La fragilité de sa victoire est consubstantielle à ce qui en a fait sa force. En rupture avec le modèle dual de la représentation politique en période de conquête, le nouveau pouvoir va devoir inscrire son action dans l’institutionnalisation de sa forme pour gouverner.
Sa victoire n’aura pas été celle d’une lente construction enracinée mais d’une opportunité courageusement saisie, saisissant le bâton tombé des mains d’une social-démocratie sans ressources. Cette victoire n’en reste pas moins légitime et étayée d’une lecture (critique) de la société qu’on ne peut balayer d’un revers de main par sa seule caractérisation libérale.

La période cumule des exigences sur la pensée et sur l’action. Elle sont bien sûr à la fois stratégiques et organisationnelles mais elles sont surtout intellectuelles et politiques. Parce que tous les champs de l’action politique sont concernés, ce n’est pas une mais toutes des dimensions qu’il va s’agit d’articuler. 

A l'heure ou l'expérience Macron aborde désormais la phase de l'exercice du pouvoir, nul doute que les contradictions de cet exercice et la fragilité de l'édifice vont ouvrir les espaces d'une opposition revigorée. Je ne suis pas sûr toutefois que les difficultés du premier suffiront à valoriser le discours de la seconde. 
Un prochain billet, ici même, reviendra sur ces premiers pas. Tout comme nous le ferons à l'occasion de la réunion constitutive du carrefour progressiste, le 13 septembre prochain.

jeudi 6 juillet 2017

3eme ligne de métro : arrêt du tracé



Toulouse. Le Conseil Syndical du SMTC a arrêté le futur tracé de la 3ème ligne de métro. Or, le SMTC ne formule aucune précaution suspensive alors que, contrairement aux engagements pris, les études relatives aux alternatives suggérées lors du débat public n’ont à ce jour pas rendu leurs conclusions. Cette décision relève donc à ce stade d’une anticipation de l’avis des experts missionnés fragilisant ainsi leur solidité objective.
Cette méthode du fait accompli relativise, de fait, la méthode engagée et la dépolitisation de l’enjeu que la dimension scientifique de l’expertise entendait manifester.
Il est par ailleurs regrettable qu’une telle décision intervienne préalablement à la consolidation précise de son financement alors même que ce dernier ne saurait souffrir d’aucun aléa dans la trajectoire budgétaire de maitrise des dépenses d’exploitation et de contrainte forte sur d’autres investissements pour les 20 ans qui viennent sur notre grand territoire.
Ce projet pour lequel le soutien des communes et collectivités territoriales concernées est au rendez-vous, et bien qu’il réponde à des enjeux de desserte de zones d’emploi d’importance,  préempte en effet la quasi-totalité des capacités de développement du réseau de transport urbain structurant des décennies futures. 
Il est à craindre que les prochaines révisions du Plan de Déplacement inaugurent l’oraison funeste de nouvelles ambitions.