mercredi 30 septembre 2015

Palabres et préalables

Simone de Beauvoir disait que « pour désirer laisser des traces dans le monde, il faut en être solidaire ». De ce point de vue, le triste épisode du conseil communautaire ou l'on a vu le Président de l'Association des Maires de Grandes Villes en action dans sa propre collectivité, laissera des traces. Mais pas celles qu'il imagine.

Il y fut question de la prédisposition républicaine à accueillir les réfugiés. Pour le premier magistrat de la ville de Toulouse, la prédisposition aura été entachée de circonvolutions. Drapées du vocabulaire de la responsabilité, elles masquent mal une forme de capitulation devant la première des responsabilités républicaines qui est celle d'assumer "sans réserves" l'asile.
Il fut proposé de remplacer ce terme par celui d'un asile "sous conditions". Pourquoi tant de préalables pour ce geste élémentaire qui consiste à manifester sa solidarité en faveur de ces nouveaux boats people de ce début de siècle ?

"Il ne suffit pas de dire Welcome" nous rétorqua le Maire de Toulouse. Mais encore faut-il dire Welcome ! lui répondront Jean-Paul Sartre, Raymond Aron et... le pape François. 
Après tout, si la maison manque de pain, l'urgence du partage n'en est-elle pas plus pressante en pareille circonstance ?

L'autre choix n'est que d'alimenter, en conformité avec l'humeur isolationniste de certains concitoyens, le repli et la mise en concurrence des misères du peuple. Ce n'est pas en cela qu'on reconnait les grands politiques. On y décèle davantage la lente dérive de la renonciation plutôt que l'annonciation féconde d'une résistance.

"Je suis Charlie" n'est pas si loin. Le temps est venu de dire aussi "je suis Aylan". L'intendance suivra car elle ne saurait être un prétexte à l'inaction. Forcer le destin, agir et décider, tel est la fonction première de l'homme politique quelque soit son rang.
Au lieu de cela et pour ce qui tient lieu de politique, le maire de Toulouse est devenu le maire des  préalables. Dès lors qu'une difficulté de gestion se présente, c'est le préalable à l'action qui rapplique. De l'accueil des réfugiés à l'ouverture d'une aire de grand passage, pour ne citer que ces exemples, les préalables surgissent. Ils conduisent au mieux à l'immobilisme et au pire à la reddition. Ils sont bien une forme d'irresponsabilité qui conduit, dans l'aveuglement, à ne plus respecter son opposition démocratique.

Oui, les élus socialistes ont eu raison de quitter séance tenante le conseil communautaire.


lundi 28 septembre 2015

BUN

Alors qu'est inauguré le premier tronçon du Boulevard Urbain Nord, l'interrogation demeure sur toutes les autres tranches de réalisation. En effet,  si ce projet figure au programme d'investissements décidé par la Métropole toulousaine d'ici 2020, c'est à hauteur de 30 M€ au lieu des 180 M€ nécessaires pour le réaliser.
A ce rythme, il faudrait donc près de 6 mandats, soit 36 ans, pour voir enfin réaliser ce besoin de desserte du Nord toulousain.
Ce projet, qui figurait au Plan de Déplacement Urbain dont la révision est aujourd'hui engagée, est donc remis en cause alors que ce secteur de notre agglomération a un besoin urgent de dessertes nouvelles, rapides et efficaces.


Entre totem et tabou : oui à la tarification proportionnelle transports (2ème partie)

Je disais dans ma note précédente du 18 septembre que le plus important dans une politique tarifaire est de déterminer les objectifs poursuivis.   
  • On connait l'objectif comptable manifestant la recherche d'équilibre avec le prix du service. C'est le discours de justification par la vérité des prix et donc hausse de tarif. Sauf qu'un prix n'est pas un tarif. Un récent rapport de l'Institut Montaigne avance cette logique, parallèlement accompagnée dans son corpus - cela a son importance - par le choix de la mise en concurrence, du partenariat public-privé et de la délégation de service public.
  • On peut poursuivre aussi un objectif conjoncturel de stabilité des prix dans un secteur où la mission de service public représente un cout d'accès important pour les ménages.
  • Nous avons par ailleurs l'objectif de promotion de l'activité par des tarifs commerciaux incitatifs car attractifs et qui rejoint le souci environnemental.
  • Il y a enfin l'objectif distributif pour rendre le service accessible dans des conditions comparables à toutes les classes de revenus et sur l'ensemble d'un territoire donné.
La question est donc de faire un choix parmi tous ses objectifs sachant que l'on doit matérialiser au bout du compte la reconnaissance d'un "droit au transport" effectif. S'il s'agit d'un droit, l'effectivité de son accès pour tous est donc majeure (notamment en tout point du territoire, mais c'est un autre débat).

mardi 22 septembre 2015

Des primaires pour l'unité !

La proposition du Parti Socialiste d'organiser un référendum pour l'unité semble chagriner certains au point de la qualifier, comme Mediapart, de "cynisme malhabile et dépolitisé".

Les mêmes, n'en doutons pas, se réveilleront peut-être dès lors qu'il s'agira d'éviter la victoire du Front National comme ils le firent après le 21 avril 2002, narines pincées en votant Chirac. Hollande n'était pourtant pas Président, Macron n'était pas ministre.

Ils me répèteront bien sûr que tout cela fut déjà le résultat d'une démission-trahison de la gauche. Cette même gauche que d'aucuns considéraient pourtant la plus à gauche de toute l'Europe, qui créa un million d'emplois, les 35 h, la CMU etc... Comment croire la sincérité d'un telle explication ?
La fragmentation, certains autres me diront, dans un entre-deux frisant le quant à soi, qu'il faut l'analyser et la comprendre. Sauf que désormais, comprendre, c'est banaliser ; alors que bien des arguments ne semblent être que des calculs pour d'autres desseins, des prétextes d'appareil, des réflexes inconséquents.

Aujourd'hui, il s'agit d'élections régionales. Après avoir géré ensemble durant six ans et voté ensemble 95 % des décisions prises, comment justifier la division de la gauche si ce n'est par la quête d'une délimitation politique à construire en son sein. Qui dit délimitation, dit limitation. Le danger de la dispersion est bien celle de l'élimination de chacun. Ici même à Toulouse, l'expérience des municipales le démontre. Comment ne pas constater qu'après la division lors de l'élection surgit nécessairement l'unité dans la résistance ? La gauche française serait-elle la plus bête du monde ?

Le peuple de gauche, que beaucoup prétendent aujourd'hui incarner à eux seuls, est majoritairement favorable à l'union. Alors qu'on invite les socialistes à entendre les messages du peuple, alors entendons aussi celui-là. Il est d'une urgence absolue alors que la famille Le Pen menace d'achever son parcours de respectabilité à la tête de régions et constitue désormais le cœur de la matrice idéologique du bloc conservateur.

Oui, depuis plus de 50 ans, notre pays n'a jamais traversé de radicalisations à droite aussi intense et de doute aussi profond sur les valeurs fondatrices de son identité. Et c'est justement ce moment historique que choisirait la gauche pour affaiblir davantage la France et la République ? Il n'y a aucune excuse pour la stratégie de la terre brulée dont la seule fécondité serait celle d'interdire un avenir démocratique au Nord-pas de Calais ou en PACA.

Le propre de la gauche est de ne jamais être d'accord sur tout. Mais la force de la gauche a toujours été d'être d'accord sur l'essentiel. 
Or, l'essentiel est là, aux portes du pouvoir, sur les lèvres de toutes les droites, installé dans les derniers salons où l'on cause. Le ventre n'a été jamais été aussi fécond... "habilement cynique et dépolitisé".

Malade, menacée par le nationalisme et par certaines élites capables de renoncer à des libertés pour conserver leur aura ou leur pouvoir au nom du peuple lui-même, la société républicaine a connu cela à d'autres périodes de son histoire (*). A ces moments là, elle a toujours choisi l'impératif moral auquel semblent se dérober aujourd'hui beaucoup de sincères démocrates du monde des idées. Heureusement que Jaurès, dans ces rendez-vous là, n'avait pas "tortillé du postérieur".

(*) "Jean Jaurès", Gilles Candar et Vincent Duclert, fayard, 2014

lundi 21 septembre 2015

"être à la hauteur de ceux qui nous arrivent"

L'historien François Cusset a publié une tribune, "honneur de l'accueil, déshonneur des philosophes" (Le Monde du 20/09/2015), en appelant au réveil face à ceux qui considèrent le peuple français comme méprisé (...) pendant que les populations étrangères sont accueillies devant les caméras du 20h (M. Onfray dans le Figaro).

Extrait :
"Emmanuel Levinas faisait de l'accueil l'étape liminaire de toute éthique, pour se défaire de sa place en faisant place à un autre. Hannah Arendt voyait les déplacés comme des victimes des droits de l'homme, qui ne concernent toujours que ceux qui ont déjà un sol : or, c'est à partir de ceux qui n'ont nulle part où aller, suggérait-elle, que la démocratie peut être réinstituée. Gilles Deleuze opposait les sciences nomades et les errances de l'exil aux savoirs d'Etat et à la tristesse du pouvoir. Daniel Bensaïd soulevait le paradoxe de "l'étranger intime", l'étranger dont il faut reconnaitre la part qui nous habite.
Quant au vieux Kant, dans son projet de paix perpétuelle, appelait de ses vœux un "État universel cosmopolite". Il aurait sans doute rejoint ceux, trop rares, qui aujourd'hui proposent que l'Union Européenne accorde la Citoyenneté européenne à ceux-là même à qui les nations la refusent.

Soyons à leur hauteur, surtout, de ce qui arrive et de tous ceux qui nous arrivent".

vendredi 18 septembre 2015

Tarif des transports : les premiers désherbages du Professeur Ivaldi (1ere partie)

Suite à cet entretien de Marc Ivaldi dans la Dépêche du Midi sur la question des tarifs dans les transports, quelques remarques me viennent à l'esprit. Le sujet est d'actualité et je devine la volonté du Maire de Toulouse, en faisant appel à ce chercheur, de préparer les esprits à certaines décisions.

Le conseil municipal de Toulouse a voté le 6 mars dernier une requête expresse à ses élus siégeant au SMTC :  
"le Conseil Municipal de la Ville de Toulouse demande aux élus du Conseil Syndical des Transports en Commun de garantir le maintien des mesures tarifaires en faveur de la mobilité des séniors de plus de 65 ans et des jeunes de 4 à 25 ans"
Quel devenir sera réservé à cet engagement par ceux là même qui l'ont voté ? Le sort de cette nouvelle promesse semble s'approcher de l'heure du verdict. Attendons donc patiemment les décisions avant tout jugement définitif même si je souhaite livrer ici, à travers ce billet, quelques remarques sur les propos en éclaireur tenus ce jour par cet économiste toulousain.

Que nous dit M. Ivaldi ? 
"Il faut faire payer en fonction de ce que le voyageur est prêt à payer".  
La disposition à payer, vieil adage de la théorie classique de l'offre que l'on enseigne sur les bancs de nos facs, peut aussi inspirer une autre conclusion que celle de Mr Ivaldi. Ne dissertons pas longuement sur le sujet. Mais si je suis ce raisonnement, cette disposition devrait être d'autant plus grande pour les entreprises que ce sont elles qui ont le plus besoin d'acheminer leurs salariés. Pourtant - il le suggère plus loin - il faudrait leur alléger ce coût et donc le transférer sur l'usager. Faudrait-il supprimer la prise en charge à 50 % pour l'abonnement des salariés ou réduire le versement transport ?
"Lorsque vous vendez des pommes de terre du marché du Cristal, vous essayez de savoir ce que l'acheteur est prêt à payer"
Cet exemple de la formation du prix d'équilibre est symptomatique du mélange - si j'ose dire - des choux et des carottes, c'est à dire du client et de l'usager. Je n'épiloguerais pas mais dans un service public, par définition, le prix d'équilibre n'a pas tout a fait les mêmes déterminants. Si le service public a un coût, il n'est pas que le terme d'une équation. Il est constitutif d'une émancipation, d'un intérêt général, d'externalités positives autrement mesurables et finançables par l'impôt. 
"Celui qui ne fait qu'un voyage de temps en temps est prêt à payer le ticket plus cher que celui qui a besoin du transport chaque jour"
La belle affaire. Ce qui est proposé là est d'instaurer ce qui existe déjà, des tarifs abonnés et des tarifs à l'unité. La recette des occasionnels compensant une part du déficit causé par les recettes des abonnés au tarif préférentiel, je crains toutefois la conclusion que la stricte vision gestionnaire pourrait en tirer. 
"La tarification selon la distance (...) est aussi une piste à étudier (...) celui qui est loin du centre est prêt à payer plus que celui qui est près"
Il sera surtout prêt à ne plus payer du tout, à prendre sa voiture et à demander une seconde rocade à 800 M€. Or, moduler selon la distance dans notre réseau urbain comme la SNCF, c'est la double peine pour l'usager de périphérie. L'offre de transport est plus rare mais il devrait payer plus cher ! Peut-être s'agit-il cyniquement d'extrapoler le vieil adage voulant que la rareté soit forcément chère ou bien est-ce une interprétation particulière des principes d'équité et d'égalité. Dans ces conditions, exit le principe même de péréquation ! Autre objectif possible mais moins avouable que l'on puisera dans le savant calcul d'élasticité cher aux études tarifaires : un tarif plus élevé dissuadera l'usage du transport dans les secteurs du territoire non rentables. Mais je ne veux pas croire à cette définition de la Métropole solidaire !
"Les politiques se trompent en pensant qu'accorder des gratuités à certains va leur permettre de s'assurer leur voix"
Ne viendrait-il pas à l'idée des diffuseurs de la doxa économique de penser qu'une décision puisse être prise parce qu'on la croit juste et d'éviter de considérer la politique comme un marché d'offre et de demande ? L'abolition de la peine de mort fut-elle motivée par un bénéfice électoral escompté ? Je pourrais dire de même aujourd'hui de l'accueil des réfugiés. Nouvel exemple de la dérive culturelle que manifestent ces glissements sémantiques. Tout devient marché dont la modélisation suffirait à définir le bien commun. 
"Est-il normal qu'un cadre chômeur touchant 6000 euros d'indemnités voyage gratuitement ?" 
Frappé du sceau de l'équité, cet exemple n'est pas neutre. Il est révélateur d'une prédisposition de nature idéologique. Plutôt que l'exemple du demandeur d'emploi (rappelons que la moyenne des allocations est à 900€), j'aurais préféré voir cité la gratuité dont bénéficie le professeur d'université de plus de 65 ans croisant dans le métro ses étudiants au tarif payant ! A chacun ses illustrations. Gardons nous toutefois d'un faux procès à l'intéressé : sa volonté de remettre en cause  la gratuité des séniors est énoncée.


Je reviendrais à une autre occasion sur l'idée avancée du "paiement en fin de mois". Nul besoin d'aller chercher l'inspiration au Brésil ou auprès d'un prix nobel. Il suffit de se rendre à Nantes, Belfort, Brest, Le Mans ou à Angers qui ont instauré ce qu'on appelle le post paiement. Pourquoi pas ? Mais aussi technique et moderne que soit la solution, elle n'évacue pas la question de l'objectif politique poursuivi.  

Une politique tarifaire va obéir à des objectifs politiques qui peuvent varier. Ce sera l'occasion d'y revenir ici-même à l'occasion d'un autre billet.

mercredi 16 septembre 2015

Commission d'enquête sur la PLB : la solution simple pour lever l'inquiétude...



La Commission d’Enquête Publique a rendu son avis concernant le prolongement de la ligne B. Émettant un avis favorable avec réserves, il relève désormais de la responsabilité du SMTC de répondre à ces dernières.  
Ces réserves, dont le cœur est l’expression d’une inquiétude sur le financement et les délais de réalisation interpellent donc en premier lieu le syndicat des transports.

Si Monsieur Moudenc doute de la capacité du SICOVAL à cofinancer cette opération alors que ce dernier confirme son engagement, une solution simple et rapide demeure pour lever à la fois l’inquiétude et la réserve. Celle de voir le SMTC assumer totalement le financement du PLB comme l’exige l’exercice de sa compétence transport (soit + 140 M€).

On nous répète inlassablement que le coût d’investissement d’une 3eme ligne de métro, évalué à 1.7 Milliard est possible. Comment celui d’un prolongement à 400 Millions ne le serait-il pas ? La question relève donc d’un choix politique et ne saurait s’abriter derrière l’avis de commissaires enquêteurs.

Concernant le délai de réalisation, si le rapport évoque plus « raisonnablement » l’horizon 2022, ce délai pour 4 km de prolongement n’interroge-t-il pas celui qui est envisagé pour une 3eme ligne de métro de 15 km promis pour 2024 ?
De ce point de vue, comment ne pas méditer la remarque émise par ce document sur le PLB indiquant que la solution métro aurait été adoptée trop en amont, avant une réelle analyse comparative, et correspondant davantage à un choix politique.
A bon entendeur…

mardi 15 septembre 2015

Trompe l'oeil

A grands renforts de communication, la ville de Toulouse argumente sur l'effort fiscal demandé aux toulousains. Décodage...

Voilà son graphique






La recette de la hausse d'impôt est présentée comme constante à 30 M€, au mépris de son effet multiplicateur les années suivantes.









 




Évolution de produit figurant dans le document budgétaire de la ville










La vérité sur la recette générée par la hausse d'impôt par rapport au produit 2014, selon ses propres chiffres, serait la suivante en prenant en compte l'évolution des bases.